Définition et portée de l'obstination déraisonnable

L’obstination déraisonnable survient lorsque des traitements médicaux sont maintenus ou entrepris malgré une absence de bénéfice clinique avéré pour la personne malade, souvent en phase avancée d'une maladie grave, incurable ou d’une affection grave et incurable. Ces soins peuvent inclure la ventilation artificielle, la réanimation, la dialyse, l'hydratation artificielle, ou encore une hospitalisation prolongée sans réelle perspective d’amélioration.

Cette approche soulève des interrogations sur la pertinence de prolonger la vie à tout prix, au risque d’intensifier les souffrances d’un malade en fin de vie. Dans ce contexte, la volonté du malade, lorsqu’elle est connue ou consignée dans des directives anticipées, doit être centrale. En France, la loi Leonetti, renforcée par la proposition de loi Claeys-Leonetti, encadre ces fins de vie et encourage une réflexion centrée sur l’accompagnement en fin de vie plutôt que sur une volonté de hâter la fin.

Les enjeux éthiques de l'obstination déraisonnable

Sur le plan éthique, l’obstination déraisonnable met en tension plusieurs principes fondamentaux : la volonté de mourir dans la dignité, l’interdiction d’abréger volontairement la vie (dans le cas de l’euthanasie ou du suicide assisté, toujours interdits en France à ce jour), et le respect de la volonté du patient. Elle confronte aussi les soignants, infirmiers, infirmières, médecins, à des décisions profondément humaines dans des situations de fin de vie parfois complexes.

Face à ces dilemmes, une procédure collégiale, réunissant l’équipe soignante, le médecin-traitant, et le cas échéant la personne de confiance, s’avère essentielle. Elle permet de prendre des décisions en accord avec les droits des malades et leur volonté de mourir dans des conditions acceptables, sans tomber dans l’insupportable ou l’acharnement.

Deux personne qui se tiennent la main

Cadre juridique et réglementaire

Le cadre législatif français, notamment la loi relative aux droits des malades et à la fin de vie, offre des balises claires : un patient en fin de vie a le droit de refuser ou d’interrompre tout traitement. L’arrêt du traitement, incluant la nutrition et l’hydratation artificielle, peut être décidé si cela correspond à la volonté du patient ou, en l’absence de celle-ci, à ce qu’il aurait souhaité.

La sédation profonde et continue jusqu’au décès, parfois appelée sédation terminale, peut être proposée en cas de douleurs insupportables ou d’affection grave sans espoir de retour à une qualité de vie. Cette sédation, décidée dans le cadre d’une démarche collégiale, est soumise à des critères stricts que le médecin doit respecter. Des outils comme les directives anticipées rédigées en amont ou la désignation d’une personne majeure en tant que personne de confiance permettent de guider ces décisions.

Le rôle des proches et des soignants

Les proches du défunt et les soignants ont un rôle primordial dans les accompagnements de fin de vie. Leurs témoignages sur les valeurs et volontés du patient, mais aussi leur écoute et leur empathie, sont indispensables pour respecter la volonté du malade et éviter des traitements jugés disproportionnés.

Une communication ouverte entre les familles, les médecins et les infirmiers ou infirmières est la condition pour que les décisions ne soient ni imposées, ni source de conflit. L’écoute, la compassion et le dialogue sont au cœur d’une prise en charge palliative de qualité, conforme à l’éthique médicale et à la déontologie professionnelle.

Il est important que les familles et les professionnels de la santé communiquent ouvertement et honnêtement entre eux [...]

Promouvoir des soins respectueux en fin de vie

Pour prévenir toute forme d’obstination déraisonnable, il est essentiel de favoriser une culture du soin de fin de vie respectueuse de la volonté du patient. Cela implique de promouvoir les soins palliatifs, de valoriser l’accompagnement en fin de vie, et de reconnaître pleinement la légitimité de rédiger des directives anticipées ou de désigner une personne de confiance.

Les professionnels de santé doivent être formés à la bioéthique, accompagnés dans leurs prises de décision par des ressources comme le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie, et encadrés par des textes clairs comme la loi Leonetti et ses évolutions. L’objectif n’est pas de hâter la fin, mais de ne pas la prolonger de manière insupportable, dans le respect des souhaits de la personne mourante.

En conclusion, l’obstination déraisonnable en fin de vie met en lumière la complexité des décisions médicales dans un contexte de maladie grave et incurable. Face à ces fins de vie marquées par la fragilité et le doute, il est crucial de replacer le patient au cœur des décisions, d’écouter ses volontés et de respecter sa dignité. En favorisant un climat de confiance, en s’appuyant sur la nouvelle loi, et en encourageant les échanges entre professionnels, familles et patients, la société peut avancer vers une fin de vie plus humaine, plus éthique, et véritablement choisie.